01/03/2019. Oui, les étudiants de Vontovorona sont (encore ?) en grève, et ce depuis le lundi 25 février. 5 jours après, tension et frustration sont encore palpables du côté des étudiants de la Polytech et pour cause, ces derniers mettent en avant plusieurs revendications qui cristallisent un mal-être profond : l’augmentation à 100 % des bourses d’études, la baisse des frais de transport reliant Vontovorona à Antananarivo, la révision du loyer à la baisse, la mise en place d’un intranet avec une connexion internet partout dans le campus, la libération de leurs camarades détenus par la gendarmerie, mais surtout, la création de nouveaux logements pour les étudiants, ou tout du moins la réhabilitation des infrastructures en place qu’ils qualifient de « cas désespérés ».
Culture de la grève à Vontovorona ou problèmes plus profonds ?
Grève à Vontovorona. Ces mots sonnent comme une routine, voire une tradition. C’est un fait : chaque année universitaire, souvent durant le deuxième mois d’études, apporte son lot de grèves et des manifestations à l’Espa (Ecole Supérieure de Polytechnique d’Antananarivo). Entendre ces mots devient alors familier.
Alors, culture de la grève ou problèmes plus profonds ? Qu’est-ce qui incite vraiment ces étudiants à se soulever régulièrement ? Le Stileex Post est allé mener son enquête auprès des universitaires et des membres du Cemp (Collège des Enseignants des Malagasy Permanents).

Interrogés sur les racines nourrissants les manifestations, à la fois nos sources auprès du Cemp et les étudiants de Vontovorona ont émis le même son de cloche : le manque de moyens. Oui, même l’administration comprend la raison des grèves des étudiants.
Déjà, il faut savoir que les problèmes d’attribution de bourses d’études sont devenus récurrents à l’université d’Antananarivo. D’après les étudiants de Vontovorona, les calendriers de distribution des bourses ne sont affichés par l’administration qu’à la force d’une manifestation et les retards seraient systématiques. De son côté, le Cemp explique ces retards par le manque de financement à leur niveau. Mais en attendant, les étudiants, dont beaucoup ne peuvent s’appuyer que sur ces allocations, se retrouvent dans le rouge. Faire la grève est donc devenu une manière de faire entendre leur voix et d’obtenir gain de cause.



L’insalubrité des logements
L’Espa est une vénérable institution qui fêtera ses 45 ans cette année et durant ces 45 années, aucune rénovation conséquente n’a jamais été réalisée sur les lieux de résidence des étudiants. Questionnées sur ce fait, nos sources auprès de la Cemp n’ont pu que hausser les épaules d’impuissance « On ne peut rien faire, on n’a pas de budget ».
En attendant, les infrastructures du campus à Vontovorona sont fortement détériorées alors que, d’un côté, le loyer augmente régulièrement. La dernière hausse du loyer initiée par le Croua (Centre Régional d’Œuvre Universitaire d’Antananarivo) serait-elle donc l’étincelle qui a mis le feu aux poudres ? Oui et non.
Selon les étudiants que nous avons questionnés, le problème ne réside pas tant dans la hausse du loyer, mais dans la qualité, ou plutôt dans le manque de qualité des logements dans lesquels ils sont obligés de vivre. Entre problème sanitaire et problème de sécurité, les étudiants ne savent plus où se mettre. Par ailleurs, ces étudiants nous ont révélé que depuis cette année universitaire 2019, ils sont passés de 4 à 6, voire 8 à être tassés dans la même chambre de 16 m².



Difficulté à étudier
Le manque de moyen touche également les dispositifs et outils normalement essentiels aux études à Vontovorona. Les étudiants que nous avons interviewés sont en cinquième année et ne peuvent retenir leur amertume. Devant naturellement faire des recherches pour écrire leurs mémoires, ils doivent venir jusqu’à Ankatso pour les faire puisque le campus de Vontovorona n’a pas les ressources nécessaires pour cela. « Ni connexion internet ni bibliothèque digne de ce nom » diront-ils.
Ce manque de moyen affecte ainsi même la bibliothèque, désespérément vide, « pas digne d’une grande école » pour reprendre les mots de l’un d’eux. « On n’y trouve que des mémoires d’études », continuera-t-il.
Pour l’instant, il règne un calme irréel à Vontovorona. Les manifestations sont momentanément suspendues, le collectif des étudiants grévistes ayant laissé 24h au gouvernement pour étudier leurs revendications. La grève reprendra de plus belle le samedi 2 février si jamais ils ne sont pas entendus.
En attendant, les faits sont là, les conditions d’études et même de vie sont dures. Les étudiants de Vontovorona espèrent donc que des actions concrètes résolvent les différents problèmes qu’ils rencontrent. Affaire à suivre.