« Ny betsileo tsa mba mamo fa ny toaka ro mahery », ce proverbe betsileo de Madagascar, voulant littéralement dire « les betsileo ne sont jamais ivres, c’est le rhum qui est fort » prouve l’importance du galeoka dans la culture malgache. Le toaka gasy, rhum traditionnel malgache est un des produits phares des régions sud et sud-est de Madagascar. Malgré la clandestinité de sa production, on peut dire que ce rhum circule beaucoup dans le pays. C’est pourquoi nous nous sommes plus ou moins intéressés à cette boisson que l’on se passe en dessous de la table.
La fabrication du toaka gasy, le rhum traditionnel malgache
Communément appelé ranomafana ou galeoka, le traditionnel toaka gasy est fabriqué dans la région d’Amoron’i Mania. D’ailleurs, c’est la région la plus réputée pour ce produit.
La préparation de la canne à sucre
C’est l’ingrédient principal du rhum traditionnel malgache. Cette plante est sacrée pour les Malgaches, car elle incarne la masculinité. Les artisans coupent les tiges pour les transporter à la distillerie artisanale ou traditionnelle. Selon les professionnels en la matière, la partie supérieure de la canne a une faible teneur en sucre, c’est pourquoi ils la coupent.
Une fois qu’ils auront enlevé toutes les feuilles de la canne, ainsi que la partie faible en sucre, ils coupent le reste en petits morceaux pour passer à la seconde étape.
La fermentation
C’est l’étape la plus importante dans la fabrication du rhum malgache. Pour ce faire, on creuse un trou pour enterrer les morceaux de canne à sucre. Puis, on bouche ce trou pour éviter tout facteur de perturbation à y entrer comme la pluie et l’air. On laisse la canne enterrée pendant plusieurs jours pour que la fermentation soit efficace.
L’ajout du « laro »
Après environ une semaine sous terre, on met la canne fermentée dans une grande barrique pour y ajouter le « laro » pour donner du goût au rhum. Le plus utilisé c’est le haronga ou harungana madagascariensis, une plante originaire de Madagascar. Cette plante est utilisée, car elle donne un goût léger à l’arome.
La cuisson
Une fois le ferment ajouté, il suffit de bien recouvrir la barrique et cuire le mélange. Une fois que cela se met à l’ébullition, la vapeur est conduite dans un tuyau qui est en contact avec la barrique. Il suffit juste de faire passer de l’eau froide par-dessous le tuyau pour provoquer une réaction chimique. Le liquide obtenu est ensuite versé dans un récipient.
Le sucre de la canne, c’est-à-dire le saccharose, avec ces procédés, s’est transformé en alcool. Et ainsi est fabriqué le toaka gasy.
Le toaka gasy dans la culture malgache
Bien que sa production et sa distribution restent encore plus ou moins clandestines, le toaka gasy est très important dans la culture et prend une grande place dans les rites traditionnels. Dans une fête traditionnelle malgache, on trouve toujours une petite trace du galeoka. Pensez-vous qu’un betsileo ferait une fête sans le toaka gasy ?
À chaque exhumation (famadihana), vodiondry (fiançailles) ou même pour une cérémonie de circoncision à Madagascar, le rhum traditionnel se doit d’être présent. Même pour construire une maison à Madagascar, la tradition veut qu’on verse un peu de ce rhum sur la première pierre. Et je tiens à préciser que les Malgaches étant très conservateurs versent un peu de rhum au coin nord de la maison, au « zoro firarazana » avant de boire. Tout ça pour dire que selon la culture de la grande île, même les ancêtres doivent encore avoir leur part de rhum.
Le toaka gasy est quand même un danger
Comme la circulation de cette boisson est encore clandestine, tout comme sa production par certains fabricants, on se demande bien pourquoi. La raison est simple, c’est une boisson dangereuse. Sa fabrication est traditionnelle, sans contrôle ni raffinement. C’est une boisson très forte, car le taux d’alcool dans le toaka gasy peut aller jusqu’à 80 %. Les artisans n’ont aucun moyen de contrôler l’alcool contenu dans le galeoka, ils n’ont aucun moyen de le mesurer, d’où le danger de la boisson.
Il faut donc limiter la consommation du toaka gasy ou rhum traditionnel malgache si on ne veut pas tomber dans le coma éthylique ou pire, mourir. L’estomac humain aura du mal à digérer un taux d’alcool aussi élevé.
Le galeoka est une richesse pour la grande île, il fait sa particularité. Toutefois, il faut bien gérer sa production et sa distribution pour éviter le trafic. Cette boisson à Madagascar est la moins consommée, surtout dans les grandes villes, à cause de sa forte teneur en alcool. Mais si vous décidez d’en boire, vous reconnaîtrez les vrais toaka gasy ou rhum traditionnel malgache par son arrière-goût sucré.
À part ces différents événements malgaches, l’utilisation de la boisson peut dépendre des cultures régionales. Par exemple, avant, dans la région de Farafangana, le peuple donnait du toaka gasy au nouveau roi, pour exprimer son honneur et sa suprématie. À Moramanga, lors d’une circoncision, au lieu de donner du zébu à la famille de l’enfant, on offre la boisson à la famille de l’enfant circoncis.
Juste une petite précision sur l’importance du « Toaka Gasy » dans la construction immobilière. Les Malgaches ont un rituel particulier que l’on appelle « Santatra », qui est d’usage pour inaugurer ou commencer quelque chose. Pour le cas d’une maison à ériger soit on en verse sur la première pierre, soit on en verse sur le chantier. Puis, on termine le reste de la bouteille en faisant la fête.
Pour les malgaches, l’alcool est considéré comme étant un signe de solidarité et de convivialité, c’est pour cela qu’il est fortement consommé lors des évènements tels que le famadihana, le fanompoam-be qui se pratique au Nord-Ouest ou encore lors du Fitampoha célébré par les orientaux malgaches. Pendant ces occasions, on peut apercevoir des bidons jaunes remplis de toaka gasy envahissant les lieux.
Tu as tout à fait raison @Hoby, le toaka gasy tient une place prépondérante dans notre société même si la plupart du temps il n’est pas consommé avec modération. Et puis je pense que la brasserie STAR a bien choisi son slogan pour son produit THB « Soa ny fiarahantsika » qui reflète bien tes propos, et c’est très représentatif du contexte malgache, un mix entre « fihavanana » et « toaka ». Mais il faut quand même faire attention à la gueule de bois :D.